Peut-on dire que dans l’industrie pharmaceutique les processus Supply Chain sont simples mais que la complexité réside dans le respect des normes GxP ?

Chaque industrie a ses spécificités Supply Chain. Ces spécificités sont structurantes : elles ont des impacts sur les outils, les organisations et les process. Ces spécificités sont diverses : réseaux de distribution, type de stockage, degré d’automatisation des entrepôts, niveaux d’intégration des partenaires, etc… Ces spécificités peuvent être liées au marché, au produit, aux contraintes géographiques et à d’autres facteurs plus ou moins déterminants.

La réglementation est une source de spécificités majeure pour la Supply Chain. C’est dans l’industrie pharmaceutique que l’on peut observer les spécificités les plus structurantes ayant pour origine la réglementation. Dans cet article, nous proposons de présenter la réglementation GxP et ses principaux impacts sur la Supply Chain. Nous décrirons certaines des solutions qui nous semblent les plus adaptées pour répondre aux attentes Supply Chain de cette réglementation. Enfin, nous proposerons une feuille de route pour implémenter ou remettre à niveau votre Supply Chain GxP.

Quelques chiffres

Le transport de produits pharmaceutiques est un secteur crucial, surtout avec la montée en puissance des vaccins et des thérapies biologiques. En 2023, le volume du transport de produits pharmaceutiques est estimé à plusieurs milliards de dollars en valeur, avec une forte prédominance du transport aérien pour les produits nécessitant une gestion stricte de la chaîne du froid. Les estimations varient, mais des chiffres montrent que plus de 50 millions de tonnes de produits pharmaceutiques ont été transportées à travers le monde en 2023.

Le secteur pharmaceutique mondial est composé de milliers d’acteurs, incluant les grands groupes pharmaceutiques, les biotechs, les sociétés de recherche sous contrat (CROs), les fabricants sous contrat, ainsi que les distributeurs. On estime qu’il y a plus de 20 000 entreprises pharmaceutiques dans le monde, incluant les multinationales et les petites entreprises. En termes d’emploi, le secteur pharmaceutique emploie plusieurs millions de personnes à travers le monde. En 2022, environ 5 millions de personnes travaillaient directement dans l’industrie pharmaceutique mondiale.

Périmètre

La Suppy Chain est un monde à part entière. Il serait trop long et trop imprécis de considérer l’entièreté de la Supply Chain pour décrier les impacts de la réglementation GxP sur son fonctionnement. Nous proposons de limiter le périmètre de cet article à la Supply Chain d’un site de production pharmaceutique basé en Europe. Ce site serait réapprovisionné par ses fournisseurs pour 90% des flux dans un entrepôt externe. Pour le reste des 10%, le site serait réapprovisionné directement dans son entrepôt propre. Le site disposerait de son propre laboratoire d’analyse et utiliserait son prestataire de stockage comme site d’échantionnage. Une seule ligne de production serait connectée à l’entrepôt du site. Le site permettrait de stocker les 3 températures : ambiant, froid et congelé.

Qu’est-ce que la réglementation GxP ?

La réglementation GxP désigne un ensemble de directives et de bonnes pratiques (Good Practices) utilisées dans les secteurs pharmaceutique, biotechnologique et des dispositifs médicaux pour assurer la qualité, la sécurité et l’efficacité des produits. Le « G » dans GxP fait référence à « Good » (Bonnes), tandis que « x » est un caractère générique qui peut désigner différents types de pratiques en fonction du contexte spécifique. Voici les 2 types de pratiques qui ont le plus d’impact sur notre Supply Chain :
GMP (Good Manufacturing Practice) (en Français : BPF pour Bonnes Pratiques de Fabrication) : Ces règles garantissent que les produits sont fabriqués de manière cohérente et contrôlée, conformément aux normes de qualité appropriées pour leur usage prévu et conformément aux conditions de l’autorisation de mise sur le marché.
GDP (Good Distribution Practice) (En Français BPD pour Bonnes Pratiques de Distribution) : Ces pratiques régissent la distribution des médicaments pour s’assurer qu’ils sont manipulés correctement tout au long de la chaîne d’approvisionnement, préservant leur qualité et leur intégrité.
La conformité aux règlements GxP est cruciale pour les entreprises du secteur de la santé, car elle garantit que les produits sont sûrs pour les patients et répondent aux exigences réglementaires internationales. En outre, ces pratiques minimisent les risques d’erreurs, de contaminations, ou de défaillances, ce qui est essentiel pour protéger la santé publique.
La réglementation GxP est largement adoptée à l’échelle internationale. Les principes GxP sont utilisés comme référence par de nombreux régulateurs et organismes de normalisation à travers le monde, ce qui permet une certaine harmonisation des pratiques dans les secteurs pharmaceutique, biotechnologique et des dispositifs médicaux. Cependant, il existe des variations régionales et nationales dans la mise en œuvre et l’application de ces normes.

            a.  Exemples de Réglementations Internationales et Nationales

  • EMA (European Medicines Agency) : En Europe, l’EMA applique les directives GxP pour garantir la qualité, la sécurité et l’efficacité des produits pharmaceutiques. Les réglementations sont harmonisées à travers les États membres de l’Union européenne.
  • FDA (Food and Drug Administration) : Aux États-Unis, la FDA impose les réglementations GxP, en particulier les GMP. Les normes de la FDA sont souvent considérées comme une référence mondiale, mais elles peuvent différer de celles d’autres régions.
  • PMDA (Pharmaceuticals and Medical Devices Agency) : Au Japon, la PMDA applique des réglementations GxP similaires, mais avec des particularités spécifiques au marché japonais.
  • OMS (Organisation Mondiale de la Santé) : L’OMS publie des directives GxP qui servent de référence pour les pays en développement et pour les entreprises souhaitant obtenir la préqualification de l’OMS pour leurs produits.
    Swissmedic est l’autorité Suisse de contrôle des produits thérapeutiques, responsable de la mise en œuvre et de la surveillance des réglementations GxP en Suisse. Swissmedic collabore étroitement avec les agences régulatrices de l’UE, comme l’EMA, pour harmoniser les normes et les pratiques.

            b.  Harmonisation et Divergences
Bien que la réglementation GxP soit de nature internationale, son application peut varier en fonction des juridictions locales. Les entreprises opérant à l’international doivent donc être conscientes des spécificités régionales tout en respectant les principes fondamentaux des GxP.

            c.  Élaboration des normes
Les normes GxP sont définies par une combinaison d’organisations internationales, d’agences régulatrices nationales, et d’organismes de normalisation, avec une forte collaboration entre les différents acteurs pour assurer une harmonisation globale.
Les normes GxP sont généralement élaborées à travers un processus collaboratif impliquant des consultations publiques, des comités d’experts, et des révisions régulières pour intégrer les avancées scientifiques et technologiques ainsi que les nouvelles exigences réglementaires. Une fois élaborées, ces normes sont adoptées par les agences régulatrices nationales et doivent être suivies par les entreprises pharmaceutiques, biotechnologiques, et de dispositifs médicaux.

            d.  Organisations Internationales

  • ICH (International Council for Harmonisation of Technical Requirements for Pharmaceuticals for Human Use) : L’ICH est une organisation qui regroupe les autorités réglementaires et l’industrie pharmaceutique des principales régions du monde (États-Unis, Europe, Japon). Elle élabore des lignes directrices harmonisées pour la qualité, la sécurité et l’efficacité des médicaments, incluant les normes GxP.
  • OMS (Organisation Mondiale de la Santé) : L’OMS élabore des lignes directrices, en particulier pour les pays en développement, sur les Bonnes Pratiques de Fabrication (GMP) et autres pratiques GxP. Ces lignes directrices sont souvent utilisées comme référence mondiale.
  • PIC/S (Pharmaceutical Inspection Co-operation Scheme) : C’est une organisation internationale qui vise à harmoniser les normes GMP à travers le monde en facilitant la coopération entre les agences de régulation. Les lignes directrices du PIC/S sont adoptées par de nombreux pays.

            e.  Organismes de Normalisation

ISO (International Organization for Standardization) : L’ISO élabore des normes internationales pour divers secteurs, y compris la qualité (ISO 9001), qui influencent les pratiques GxP, bien qu’elles ne soient pas spécifiques au secteur pharmaceutique.
USP (United States Pharmacopeia) : L’USP établit des standards de qualité pour les médicaments et les ingrédients pharmaceutiques, influençant les pratiques GMP.

            f. Industrie Pharmaceutique

Associations Industrielles : Des associations comme l’EFPIA (European Federation of Pharmaceutical Industries and Associations) en Europe, et la PhRMA (Pharmaceutical Research and Manufacturers of America) aux États-Unis, participent à l’élaboration des normes en collaborant avec les agences régulatrices et les organisations internationales.

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Application des normes GxP à d’autres secteurs

Bien que les normes GxP soient les plus couramment associées à l’industrie pharmaceutique, elles sont également appliquées dans une variété d’autres secteurs où la qualité, la sécurité, et l’efficacité des produits sont essentielles. Ces normes garantissent que les produits sont fabriqués, testés, et distribués de manière à protéger la santé publique et à répondre aux exigences réglementaires strictes.
Les fabricants de dispositifs médicaux, des instruments chirurgicaux aux équipements d’imagerie médicale, appliquent les Bonnes Pratiques de Fabrication (GMP) pour assurer la sécurité et la fiabilité de leurs produits. Bien que l’industrie agroalimentaire utilise principalement les Bonnes Pratiques d’Hygiène (GHP) et les Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF), certaines normes GxP peuvent être appliquées, en particulier dans la fabrication de compléments alimentaires, d’ingrédients pharmaceutiques actifs (API) utilisés dans les aliments, et d’aliments médicaux. Les entreprises cosmétiques qui fabriquent des produits avec des allégations de santé ou qui sont proches de la catégorie des produits pharmaceutiques suivent souvent les Bonnes Pratiques de Fabrication (GMP) pour garantir la sécurité et la qualité de leurs produits. Dans les secteurs chimiques, en particulier ceux impliqués dans la production de produits intermédiaires pour l’industrie pharmaceutique, les Bonnes Pratiques de Laboratoire (GLP) sont souvent utilisées pour assurer la conformité aux normes de sécurité et de qualité.
Les organisations de recherche sous contrat (CRO) qui mènent des essais cliniques ou des études précliniques pour le compte d’entreprises pharmaceutiques suivent les normes GxP pour garantir la validité et la fiabilité des données.

Exemples de règles GxP

Le contrôle des changements est une procédure systématique mise en place pour gérer tout changement apporté aux processus de fabrication, aux équipements, aux matières premières, ou à la documentation. L’objectif est de garantir que toute modification n’affecte pas négativement la qualité du produit final. Le contrôle des changements est essentiel pour maintenir la qualité et la conformité dans les processus de fabrication. Sans une gestion rigoureuse des changements, il existe un risque que des modifications non contrôlées puissent compromettre la sécurité ou l’efficacité d’un produit, entraînant des problèmes de qualité, des rappels de produits, ou des non-conformités réglementaires.

Cette règle s’applique dans de nombreux contextes, par exemple lors de la modification d’une recette de production pour un médicament, lors de l’installation d’un nouvel équipement dans une ligne de production ou lors de la modification des spécifications d’une matière première.

Autre exemple, la gestion efficace des documents et des archives est cruciale pour assurer la conformité aux Bonnes Pratiques de Fabrication (GMP). Une documentation adéquate garantit la traçabilité des activités, la transparence des opérations, et la possibilité de retracer les problèmes ou les erreurs pour des actions correctives et préventives. Tous les documents de procédure, tels que les procédures opérationnelles standard (SOP), les instructions de travail (WI), et les politiques de qualité, doivent être créés et révisés de manière systématique. Les procédures doivent être documentées de manière claire et précise pour garantir qu’elles sont compréhensibles et applicables par le personnel concerné. Les documents doivent être régulièrement revus et mis à jour pour refléter les changements dans les pratiques, les réglementations, ou les résultats d’audits. Les révisions doivent être documentées, y compris la date de la révision, les modifications apportées, et les personnes responsables.

Quels sont les impacts de cette réglementation sur la Supply Chain ?

Les règles GxP appliquées à la Supply Chain visent à garantir que les produits sont fabriqués, stockés, et distribués dans des conditions qui préservent leur qualité et leur sécurité, tout en assurant la conformité réglementaire et la traçabilité tout au long du processus. Les impacts décrits dans ces paragraphes sont non exhaustifs. Nous avons sélectionné les plus importants, c’est-à-dire ceux qui ont le plus d’impacts sur les outils, les process et l’organisation de la Supply Chain de notre site de production pharmaceutique.

            a. Introduction des matières & Qualification des fournisseurs

La phase de développement par les équipes de science et technologie de fabrication (Manufacturing Science and Technology, MSAT) va permettre de définir la nomenclature du produit qui sera fabriqué par le site. Une fois cette nomenclature définit (Bill Of Materials – BOM), la Supply Chain pilote l’introduction du produit sur le site (on parle de « Material Introduction »). Il s’agit de coordonner les équipes Manufacturing, Qualité, Achats, MSAT pour permettre de commander et recevoir les matières premières définit dans la nomenclature.
Avant de passer commandes, les fournisseurs sont sélectionnés entres autres en fonction du prix des matières, des minimums de quantités, des délais de livraisons. L’objectif est d’optimiser les coûts d’achats tout en assurant les niveaux de stock nécessaires pour lancer la production. A ce stade un maximum d’information est collecté par les équipes Supply Chain auprès des fournisseurs sélectionnés pour rédiger des spécifications matières, élément clé pour la traçabilité des produits.

L’équipe qualité assure la qualification des fournisseurs de façon plus ou moins complexe en fonction de la catégorie (niveau) GxP des matières commandées. Cette catégorie GxP est définit par matière. C’est un élément déterminant pour la suite du processus d’introduction et plus tard pour la traçabilité du produit. Il est défini en fonction de l’utilisation finale de la matière première dans le process de fabrication, ainsi que du type de matière définit par la Supply Chain (produit chimique, consommable process, consommable kanban – cross process). Cette catégorie GxP détermine la complexité de gestion de la vie de la matière : de son introduction à sa fin de vie en passant par sa gestion de lot. En d’autres termes (et d’un point de vue Supply Chain uniquement), il détermine le niveau de précision de la traçabilité de la matière. Une catégorie GxP élevée requerra un contrôle qualité complet à réception de la matière : contrôle documentaire (des documents de livraisons), contrôle laboratoire (échantionnage et analyse). Le lot de cette matière sera bloqué à réception et libéré pour utilisation en production par le service qualité. Il sera libéré uniquement une fois l’ensemble des contrôles effectués et évalués positifs.

Une fois la sélection des fournisseurs effectuée, la qualification de ces fournisseurs avancée, les spécification matières sont finalisées. Ces spécifications sont des « bibles » matières : elles contiennent l’ensemble des informations du produits. Les informations générales (code produit, code fournisseur, description, unité de mesure de commandes et unité de mesure alternative de stockage) nécessaires au laboratoire et à la production (composition et autres caractéristiques techniques). Elles contiennent aussi les informations nécessaires à la Logistique : colisage, taille, poids, emballage interne et externe, température de stockage.

Enfin ces spécifications contiennent les informations nécessaires à la qualité (présence d’échantillons satellites, certificats d’analyse et de conformité (CoA, CoC). Ces spécifications sont approuvées et stockées dans un système de gestion documentaire électronique (eDMS). Pour la Supply Chain elles sont critiques car elles serviront de base pour la libération des lots de matières reçues. Concrètement, une fois les matières reçues, les lots sont bloqués à réception et libérés par la qualité. Cette libération est une suite de contrôles documentaires, électroniques (systèmes – WMS), et physiques effectués par l’équipe qualité. La spécification sert de document de base envers lequel la qualité compare les éléments cités précédemment. Par exemple : la description de la matière est la même sur le carton reçu physiquement, dans le système de gestion de l’entrepôt dans lequel est enregistré la réception (WMS), dans les documents de livraison fournis par la société de livraison (bulletin de livraison), et dans la spécification.

Bien entendu, et c’est une règle primordiale dans un environnement GxP, les processus d’introduction et de qualification des matières, de qualification des fournisseurs, et de libération à réception sont procédurés, soumis aux bonnes pratiques documentaires et à la gestion du changement. Cela signifie que tout écart identifié, ou tout changement requis par rapport aux procédures liées à ces processus font l’objet d’un enregistrement dans un système de gestion de la qualité (Quality Management System – QMS). Cet enregistrement permettra le cas échéant la modification de la procédure ou de l’instruction de travail lié au processus en écart ou soumis à un changement.

            b. Stratégie de stockage, contractualisation d’un prestataire

Définir la stratégie de stockage est déterminant pour la bonne exécution des flux de matières dans le respect des normes GxP. Parmi d’autres, nous avons sélectionnés 4 flux (décris ci-dessous) parmi les plus déterminant dans le respect des normes GxP et devant être définis avec la stratégie de stockage de notre cas d’étude. Dans notre article, et comme dans la plupart des sites de production pharmaceutique, un prestataire externe est utilisé pour compléter le stockage propre à l’usine. Le prestataire étant évidemment qualifié par les institutions certifiantes GxP du pays.

       Flux 1 – Procédure de réception
Il existe de multiples solutions pour définir la procédure de réception des matières. Celle-ci doit couvrir les réceptions chez le prestataire de stockage ainsi que les réceptions sur le site de production. En fonction des systèmes de gestion de stock utilisés par le site de production et par le prestataire, la stratégie de gestion de stock entre le prestataire et le site pourra différée. La stratégie de gestion des lots de matières reçues sera aussi un élément structurant de la stratégie de stockage entre le prestataire et l’usine. La procédure de réception est à juste titre considérée comme une procédure clée pour la logistique. C’est cette procédure qui définit les règles de réception des matières : contrôles qualités et quantités, collecte de document, re palettisation sur palettes plastique désinfectée, enregistrement système, contrôle de température, identification de potentielles déviations, formalisation de la réception (la check list de réception étant un outil fréquemment utilisé par les équipes logistiques) etc… Cette procédure doit aussi couvrir les règles d’enregistrement des dates de péremption, de création des lots et donc de la base de la traçabilité future du produit.

       Flux 2 – Echantillonnage
Il est clé de définir en amont le lieu d’échantionnage des matières premières chimique de catégorie GxP la plus élevée. Comme décrit précédemment, ces matières sont soumises aux contrôles les plus strictes intégrant l’échantionnage (ou la gestion d’échantillons satellites) et l’analyse. Le prestataire de stockage peut être choisit comme lieu d’échantillonnage s’il respecte les normes GxP concernant ce flux. Si c’est le cas, cette prestation devra être couverte par l’agrément ou le contrat couvrant la prestation. Aussi une procédure et des instructions de travail devront être rédigées pour former le prestataire au requis du site de production. Le plan d’échantionnage est determinant pour les activités Supply chain du site. Ce plan organise les activités d’échantillonnage, détermine les quantités à prélever et le nombre de contenant reçus à ouvrir pour réaliser l’échantionnage. Ces éléments sont variables, évoluent dans le temps car ils dépendent des précédentes décisions d’utilisation des autres lots reçus pour le même produit. Ces éléments impactent les volumes à commander, les dates auxquelles les produits doivent être reçus et stockés, mais aussi le plan d’approvisionnement de la ligne de production car les activités d’échantillonnage prennent du temps et doivent être intégrées dans le délai de mise à disposition des produits par l’équipe logistique.

       Flux 3 – Communication des systèmes de gestion de stock (interfaçage WMS)
Le prestataire de stockage dispose de son propre outil WMS mais proposera des solutions d’intégration plus ou moins complexes avec le WMS de notre site de production. Parmi de nombreuses possibilités, il sera commun de choisir une gestion de stock simplifiée (au niveau palette par exemple) chez le prestataire. Sur site il est cependant primordial de choisir une gestion de stock au niveau de l’unité de manutention (Handling Unit) pour optimiser la traçabilité lots de matières qui seront consommés en production. Dans ce cas, une solution communément utilisée dans l’industrie et simple à déployer sera de donner accès (évidemment de procédurer et de former) au WMS du site de production à son prestataire de stockage. Celui-ci peut alors enregistrer les réceptions dans le WMS du site, et créer les lots interne selon les règles de gestion du site (éviter la multiplication des lots entre le fournisseur, le prestataire et le site). Si cette solution n’est pas envisageable, une interface entre les 2 WMS sera nécessaire. Dans ce cas, le partage de la base de données articles sera nécessaire. Cette contrainte (entres autres) obligera le site et le prestataire d’harmoniser les règles de gestion par exemple concernant les unités de mesure et la codification des articles. Le pré requis pour choisir la solution d’interfaçage est de bien étudier les technologies disponibles chez le prestataire et sur site, de mettre à plat les contraintes de sécurité, et de s’aligner avec l’équipe qualité pour chercher la solution la plus pragmatique et la plus adaptée aux besoins du site. Les prestataires de stockage actifs dans l’industrie pharmaceutique respectent des standards et proposent des solutions éprouvées avec d’autres clients.

       Flux 4 – Gestion des lots
L’élément central de la traçabilité de la matière est le lot. Comme dans d’autres industries, la gestion des lots est une obligation pour le respect des normes GxP. Ceci doit permettre une traçabilité sans faille depuis le fournisseur jusqu’au patient. A la première réception du lot fournisseur de la matière chez le prestataire de stockage ou sur site de production, le numéro de lot fournisseur reçu, la date de péremption et tous les documents requis par les procédures de réception et de libération doivent être stockés dans un lot interne. Il s’agit de la 1ère étape de la longue vie du lot matière si important pour assurer un suivi de la vie du produit. La création du lot est aussi un pré requis aux activités d’échantillonnage. En effet c’est le numéro de Lot interne qui permettra de retracer les résultats de test des échantillons prélevés. Enfin, comme expliqué précédemment, le lot est l’élément de base de la libération des matières après réception : on parle de « dossier de lot ». La procédure de réception (et de libération) expliquera comment la Supply Chain et en particulier les équipes Logistiques mettront à disposition les informations et documents nécessaire pour la libération du lot par l’équipe Qualité. Les lots seront soumis à une stricte gestion des statuts (souvent électronique dans le WMS). Ces statuts prévoient les différents cas d’utilisation et de blocage des matières. Entre autres, une distinction sera nécessaire entre le statut bloqué (en attente d’investigation par exemple) et le statut quarantaine (à détruire). Le statut libéré est le statut ultime permettant l’utilisation du lot de matière pour tout mouvement de stock. Ce statut, sous certaines conditions strictes et source d’arbitrages intenses entre les équipes Supply Chain et les équipes Qualité, pourra être complété par un statut libéré sous condition permettant son utilisation dans un mouvement de stock, sous réserve d’une libération complète future. La gestion des statuts des lots est sous la responsabilité de l’équipe Qualité, ce qui signifie une intégration parfaite avec les équipes logistiques !

            c. Procédure de libération

Les normes GxP requièrent que chaque lot de matières premières, d’emballages ou de produits finis soit soumis à un contrôle qualité rigoureux à son arrivée. Des échantillons sont prélevés pour vérifier la conformité aux spécifications définies. La libération d’un lot à réception nécessite une documentation complète, incluant les résultats des tests, les conditions de stockage, et toute autre information pertinente. Selon les normes GxP, chaque lot doit être libéré pour utilisation ou distribution par une personne qualifiée. Cette personne doit s’assurer que le lot répond à toutes les exigences réglementaires et aux normes de qualité avant sa libération. Un système de traçabilité efficace doit être en place pour s’assurer que chaque lot peut être retracé tout au long du processus de fabrication et de distribution.

Une fois reçus et créés par la Logistique, pour les catégories GxP les plus critiques, les lots de matières sont dits bloqués. Ils ne peuvent être utilisés dans une préparation de commandes, dans un inventaire ou tout autre mouvement de stock. Les équipes logistiques ayant réceptionnées la matières (à l’entrepôt externe ou sur le site de production) selon la procédure de réception, collecte les informations de lot requises. Il s’agira des documents de livraisons (bulletin de livraison, documents de transport), des certificats (disponibles sur les cartons, ou sur le site internet du fournisseur), des enregistreurs de températures (dans le cas de matières réfrigérées ou congelées), des documents de réceptions suite à l’enregistrement système (bulletin de réception). Ces éléments seront mis à disposition (électroniquement ou physiquement) de l’équipe qualité qui effectuera les contrôles requis par la procédure de libération. En cas de matière de catégorie GxP critique, nécessitant un échantillonnage, les résultats de test seront requis pour libérer le lot de matière de façon définitive.

La libération du lot de matière à réception est un processus stratégique pour la suite de la vie du produit. La Supply chain du site, via son équipe logistique, doit prendre en compte ce temps de libération utilisé par l’équipe qualité dans la planification des réapprovisionnements. Le plan de production peut être mis à risque si les étapes de réception et de libération ne sont pas maitrisées. Le processus de libération doit être coordonné par la Supply Chain et priorisé selon le plan de production, les arrivages, la capacité des équipes à collecter les informations de lots requis et les activités de l’équipe du laboratoire pour l’échantionnage, et du temps de test des matières (souvent effectués par des prestataires externes).

Nous retrouvons ces contrôles qualité, et ces activité d’échantillonnage à réception dans d’autres industries non soumises aux normes GxP. La spécificité de ces processus dans le cadre d’un environnement régulé GxP est que la traçabilité des lots ne peut pas être dégradée. Les informations de lots sont un requis pour retracer la vie du produit en cas d’impact non souhaité sur le patient. Même si cela peut paraître contre nature, c’est la Supply Chain qui doit piloter cette activité (exécutée par l’équipe Qualité) pour assurer la suite du flux de matière et limiter les impacts sur le plan de production.

            d. Validation des transports

Chaque mouvement de stock de la matière est soumis aux normes GxP. Depuis sa production par le fournisseur, jusqu’à sa consommation sur la ligne de production. La qualification des fournisseurs inclura la qualification des sites de production de celui-ci. Il est commun de considérer le transport depuis le site de production du fournisseur jusqu’au site de stockage (externe ou interne) inclut dans la qualification du fournisseur. La libération de la matière à réception assurera le contrôle de ce transport à réception. Les transferts de stock entre l’entrepôt externe et le site de production de notre exemple est un risque pour la matière. La validation de ce transport devra être inclue dans le contrat ou l’agrément signé entre le site de production et son prestataire de stockage. Sinon il devra faire l’objet au minima d’une évaluation de risque formelle, sinon d’une validation complète par les équipes Supply Chain.

La validation concerne essentiellement le contrôle de température durant les transports. Cette température est décrite dans la spécification de la matière. Il est souvent contre intuitif mais requis de considérer le transport en température ambiante comme devant être couvert par cette validation. Il est beaucoup plus évident de valider le contrôle de température pour les produits réfrigérés (2-8 degrés) et congelé (-20 degrés). La validation des contrôles d’humidité demande plus d’effort et est parfois difficile à obtenir des sociétés de transport. Enfin certaines matières comme la Working Cell Bank (WCB) ou l’expédition du produit finis feront l’objet de validation spécifiques et poussées, leurs températures de stockage et donc leur conditions et moyens de transport étant eux même spécifiques.

            e. Gestion des unités de mesure & étiquetage

L’étiquetage est un requis GxP (présent dans de nombreuses industries) dont l’impact (par exemple) sur la charge de travail des équipes Logistique est conséquent. L’objectif de l’étiquettage est de pouvoir enregistrer par scanner (et donc tracer dans les systèmes : ERP et MES) chaque unité de manutention utilisé dans le process de production. Définir la stratégie d’étiquetage est un prérequis important, intimement lié à la gestion des unités de mesure.

Bien définir les unités de mesure demande d’intégrer dans la réflexion tous les services manipulant les produits. Les flux de réception, stockage, préparation de commande, consommations en production et d’expéditions doivent être formalisé et validés dans les procédures correspondantes. Le prestataire externe doit être inclus dans la réflexion car il est, pour la majorité des produits, le premier acteur dans le périmètre de notre cas d’étude. Le fournisseur est aussi évidemment intégré, étant la source d’information initiale.

La charge de travail d’étiquetage peut devenir vite conséquente. Malgré la technologie disponible, c’est une activité qui reste très manuelle, consommatrice de temps et source d’erreur. Sans avoir vérifier, il serait intéressant d’établir une statistique sur le nombre d’observations relatives à l’étiquetage durant les audits des organismes d’inspection.

Pour définir la stratégie la plus optimale, il pourra être envisagé plusieurs étapes d’étiquetage selon le lieu de stockage du produit. Plus le produit est éloigné de son lieu de consommation, plus l’étiquetage pourra se faire au niveau de l’emballage externe du produit, voir au niveau de la palette.

            f. Autres processus déterminants

Parmi les autres processus déterminants pour le respect des normes GxP nous aurions pu sélectionner la rédaction des procédures, leurs revues périodiques et la formation du personnel. La planification des réapprovisionnements fournisseurs (supply planning) est aussi impactée, par exemple en cas de rupture fournisseur et/ou lorsqu’un besoin de sourcer une alternative à un produit, et son intégration nécessaire avec le process d’introduction des matières. La Qualification des équipements & des systèmes est un monde à part entière, et la Supply chain de notre site de production aura beau avoir le plus GxP des designs, aucun produit ne pourra être utilisé sur la ligne de production (en mode GxP) le temps que les zones et équipements de stockage et les engins de manutention ne soit qualifiés. Ll’ERP et/ou de l’outil WMS est aussi soumis à la validation gérée par les équipes Qualité CSV (Computer Science Validation). La Supply Chain étant bien évidemment cliente des activités de qualification et de validation dans ce cas, elle devra s’assurer de la bonne exécution des activités de qualification et requalification nécessaires à ses processus logistiques en coordonnant les différents acteurs.

Comme décrit dans les chapitres précédents, l’échantionnage des matières premières a un impact conséquent sur les processus, les outils et l’organisation de la Supply Chain du site. En effet cette activité nécessite d’avoir reçus les matières, et est un pré-requis pour l’utilisation des matières par la production (et donc pour un pré requis pour les activités de logistique avale).

Enfin, la planification des livraisons en production et le pilotage des activités Supply Chain pourraient aussi être des sujets à part entière tant l’impact des processus précédemment décris, structurés par les requis GxP, déterminent le pilotage des activités d’entrepôt et du pilotage de la Supply Chain de notre site de production en générale.

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Comment implémenter (ou remettre à niveau) votre Supply Chain GxP ?

Dans un contexte tendu de démarrage d’un site de production, un de nos point de contact était un expert qualité (très) expérimenté. Il avait une liste impressionnante de situations qu’il avait eu à gérer, et dont la plus critiques était une contamination d’une ligne de production. Avec beaucoup de recul, a l’aube de sa carrière en usine pharmaceutique (en Suisse), il nous a fait l’honneur de partager son constat. Pour ce faire, il utilisa une image simple. Nous espérons ici ne pas déformer ses propos (en sachant, connaissant son humour, qu’il ne nous en voudra pas s’il se reconnait !).

En résumé ses propos ressemblaient à cela : « Construire (ou remettre à niveau) une Supply chain GxP est comparable à construire une maison : les bases doivent être solides, cela demande une palette de métiers, seuls des experts peuvent le faire, l’orchestration des interventions est déterminante, un maître d’œuvre expérimenté doit être aux commandes, alors seulement, le propriétaire pourra vivre dans sa maison à la date espérée et évoluer dans celle-ci selon sess envies et ses besoins en toute sérénité ».

La première étape pour poser ces bases solides doit être une description précise des processus pour la gestion des flux de marchandises et de personnes. Ces processus vous aideront à vous poser les bonnes questions et ainsi définir votre stratégie Supply Chain GxP. Le choix des équipements et des systèmes doit faire l’objet d’une étude approfondie et leur qualification / validation pilotée de façon à s’intégrer avec les activités Opérationnelles.

Les processus intégrés avec d’autres services (en particulier l’introduction des matières, la libération des lots, l’échantionnage) doivent être anticipés et priorisés pour finaliser la définition des processus Supply Chain. Les fonctionnalités de l’ERP ou du système WMS doivent être alignés avec ces processus décrit (et doivent être parfois contraignantes dans la définition de ceux-ci : « ne pas réinventer la roue »). Les activités opérationnelles doivent être organisée par flux fonctionnels (éviter les silos) : par exemple l’activité de libération des lots, y compris l’activité d’échantionnage, doit être entièrement intégrées avec l’ordonnancement du plan de production. La « compliance », autrement dit, le niveau de formation des équipes aux requis GxP doit être suffisamment importantes pour que les équipes Supply chain et les équipes qualités fonctionnement en équipes dès la 1ere matière introduite. La gestion des données de base Matières et de leur continuelle introduction (en cas de nouveau sourcing, ou d’ouvreture d’une nouvelle ligne de production) ne devra en aucun cas être négligée : elle sera au centre du terrain en permanence. Les équipes logistiques seront dimensionnées en tenant compte des activités d’étiquettage (à réception et/ou durant la préparation de commande). Le processus de livraison de matières en production (ainsi que les retours) aura le droit à une attention particulière (en particulier les étapes de transfer de responsabilité). Les produits critiques (WCB, produits finis, produits stockés en réfrigéré ou congelé) seront couverts par des instructions et des procédures à part entière.

L’activité d’expédition sera évaluée spécifiquement en fonction du périmètre souhaité et définit dans la phase d’analyse. Enfin définir des points de contacts expert Supply Chain GxP et Compliance permettra de soulager les équipes opérationnelles et d’assurer la cohérence des enregistrements GxP (déviations, change control, etc…) et de la documentation. Ces ressources sont rares car elles doivent connaitre les processus Supply Chain et intégrer la réactivité qu’ils demandent. En parallèles elles doivent apporter leur valeur en intégrant les requis GxP (documentation, formations, gestion des déviations et des changements, préparation aux audit et inspections, etc…) de la manière la plus efficiente possible dans les processus, outils et organisation de l’équipe Supply Chain.

Nous l’aurons compris, les experts pour mettre en place une Supply Chain GxP (ou la remettre au niveau) sont pluridisciplinaires (Logistique, approvisionnement, qualité, production etc…).

En tant que cabinet de conseil en Supply Chain, notre expérience en Supply Chain et Lean management en environnement Pharmaceutique, nos profils de chefs de projet Transformation Supply chain, notre expertise technique en Logistique et gestion d’entrepôts, notre connaissance des bonnes pratiques GxP Supply Chain, notre expérience terrain en tant que chef d’orchestre (et d’exécution) de plusieurs Supply Chain GxP (complètes ou partielles), nous permettent de proposer nos services pour construire ou remettre à niveau votre Supply Chain GxP. Nous proposons nos services dans un rôle d’architecte, de gestion de projet ou d’exécution, dans un contexte d’ouverture de site de production, de Supply Chain commerciale, d’introduction d’un nouveau produit (et d’une nouvelle ligne de production), de remédiation suite à un audit, d’étude de zone de stockage ou de recherche de prestataire de stockage, enfin de remise à niveau d’ERP et WMS.

Conclusion

A la lecture de cet article, vous vous êtes certainement dit que les processus décrit sont finalement ceux que vous retrouvez dans votre industrie. Si vous êtes un professionnel de l’environnement GxP, vous vous êtes peut-être dit que les requis GxP structurant décris auraient pu en être d’autres. Nous serions ravis de collecter vos commentaires mais nous sommes assez confiants pour affirmer que oui, la complexité des normes GxP vient dans leur application et que les processus Supply Chain dans l’industrie pharmaceutique sont finalement plutôt classiques comparés à d’autres industries. Les exemples de gestion documentaire et d’étiquetage permettent de confirmer cette affirmation : la complexité de ces processus vient des requis GxP !

Par expérience, si les bases des processus décrits dans cet article ne sont pas mises en place en accord avec les requis GxP dès le départ, il sera difficile de les remettre à niveaux. Un support externe permet de catalyser la réflexion stratégique, d’apporter une perspective externe sur votre organisation, une dynamique nouvelle, ainsi que les meilleures pratiques actuelles, pour vous aider à surpasser les freins qui vous empêchent d’affronter sereinement vos audits et de délivrer vos produits au niveau de qualité attendu. SuCh Consulting propose ces activités, en plus d’une équipe expérimentée qui travaillera en collaboration avec vous pour fournir ce soutien.